Accrues et mosaïques paysagères dans la Lorraine en reconstruction, 1635-1735.
Contenu
Titre
Accrues et mosaïques paysagères dans la Lorraine en reconstruction, 1635-1735.
Edition
À paraître dans <i>Cahier d'études n°21, 2011. Forêt, environnement et Société XVIe-XXe siècle</i>.
Auteur
LORMANT, François
ROCHEL, Xavier
ROCHEL, Xavier
Résumé
Les « malheurs de la guerre » qui accablent la Lorraine du XVIIe siècle, précédés -ce que l’on oublie souvent- par quelques décennies difficiles après l’âge d’or du XVIe siècle, conduisent à une violente régression démographique et à une forte contraction des finages. Cette déprise amène dans le paysage lorrain de vastes surfaces enfrichées, voire envahies par la forêt, ce qu’on nomme des accrues ou, parfois, accroissements de bois. La fin des troubles, le nouvel essor démographique (en particulier sous Léopold) entraînent une reconquête de ces espaces au statut incertain. Vers 1710-1720, les finages lorrains retrouvent peu à peu leur plénitude d’antan, et la reconquête des accrues est alors source de multiples litiges qui ont laissé des traces nombreuses dans les archives.Il s’agit ici d’étudier le statut des accrues, et leur devenir au sortir des démêlés du début du XVIIIe siècle. Les accrues revenaient-elles automatiquement aux héritiers des anciens occupants ? Qu’en était-il si aucun héritier, aucun propriétaire ne pouvait être identifié, situation vraisemblablement fréquente après des décennies de troubles et de misère ? Les accrues revenaient-elles au contraire aux propriétaires de la forêt voisine, au seigneur haut justicier (« le bois acquiert le plain ») ? Dans ce cas, au bout de combien de temps les éventuels propriétaires des anciens héritages cultivés et leurs héritiers perdaient-ils leurs droits ?
Il ne faut pas confondre les lisières, d’une part, et les limites des massifs forestiers (ou limites forestières), d’autre part. Elles ne correspondent pas forcément. Les unes marquent des différences dans l’occupation du sol, les autres intéressent le foncier. Alors que les lisières d’Ancien Régime vont et viennent au rythme des oscillations démographiques, l’autorité publique cherche à conforter la propriété forestière par des limites stables et matérialisées sur le terrain, mais elle ne cherche pas toujours à protéger l’étendue forestière à tout prix.
Les limites établies vers 1633, quand la soldatesque de toute l’Europe déferle sur la Lorraine et les régions environnantes, sont rarement abornées, presque jamais fossoyées ; ce sont encore des limites floues. En théorie, les accrues nées de la dévastation des années suivantes devraient donc revenir aux propriétaires des bois voisins, selon ce qu’on nomme parfois le droit d’accrue ; d’autant que les éventuels titres de propriété ont généralement disparu, et que le temps de prescription évoqué par certaines coutumes est largement dépassé lorsqu’arrivent les défricheurs. Mais la politique des ducs et des propriétaires forestiers est beaucoup plus pragmatique. En obéissant trop fidèlement au droit, on se heurterait à l’incompréhension des communautés rurales, et l’on entraverait l’essor démographique qui emplit les poches des uns et des autres par la dîme, la subvention et autres impôts. Mais il faut bien arrêter quelque part les défrichements... La défense de la ressource boisée se fera donc sur la base des limites si mal définies avant 1633, mais encore présentes dans la mémoire de tous ; la population lorraine ne l’accepterait pas autrement. Le droit est court-circuité par des accords locaux : ne sont vraiment refusés que les défrichements au-delà des lisières d’avant-guerre. Les années 1720 apparaissent finalement comme un épisode important dans l’évolution des paysages lorrains, en ce qu’elles marquent l’achèvement de la reconquête des accrues héritées des « malheurs de la guerre ».
Il ne faut pas confondre les lisières, d’une part, et les limites des massifs forestiers (ou limites forestières), d’autre part. Elles ne correspondent pas forcément. Les unes marquent des différences dans l’occupation du sol, les autres intéressent le foncier. Alors que les lisières d’Ancien Régime vont et viennent au rythme des oscillations démographiques, l’autorité publique cherche à conforter la propriété forestière par des limites stables et matérialisées sur le terrain, mais elle ne cherche pas toujours à protéger l’étendue forestière à tout prix.
Les limites établies vers 1633, quand la soldatesque de toute l’Europe déferle sur la Lorraine et les régions environnantes, sont rarement abornées, presque jamais fossoyées ; ce sont encore des limites floues. En théorie, les accrues nées de la dévastation des années suivantes devraient donc revenir aux propriétaires des bois voisins, selon ce qu’on nomme parfois le droit d’accrue ; d’autant que les éventuels titres de propriété ont généralement disparu, et que le temps de prescription évoqué par certaines coutumes est largement dépassé lorsqu’arrivent les défricheurs. Mais la politique des ducs et des propriétaires forestiers est beaucoup plus pragmatique. En obéissant trop fidèlement au droit, on se heurterait à l’incompréhension des communautés rurales, et l’on entraverait l’essor démographique qui emplit les poches des uns et des autres par la dîme, la subvention et autres impôts. Mais il faut bien arrêter quelque part les défrichements... La défense de la ressource boisée se fera donc sur la base des limites si mal définies avant 1633, mais encore présentes dans la mémoire de tous ; la population lorraine ne l’accepterait pas autrement. Le droit est court-circuité par des accords locaux : ne sont vraiment refusés que les défrichements au-delà des lisières d’avant-guerre. Les années 1720 apparaissent finalement comme un épisode important dans l’évolution des paysages lorrains, en ce qu’elles marquent l’achèvement de la reconquête des accrues héritées des « malheurs de la guerre ».
Editeur
GHFF, avec le soutien de l'ONF et du Minsitère de l'Agriculture et de la pêche.
Année
2010
Type
Article
Pages
10 pages
Mot-clé
Accrues forestières
Mosaïques paysagères
Lorraine
1635-1735
Paysages ruraux
Paysages forestiers
Mosaïques paysagères
Lorraine
1635-1735
Paysages ruraux
Paysages forestiers