<i>Tu ne tromperas pas</i> : la répression de l'adultère de l'Antiquité tardive à l'époque féodale.
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Titre
<i>Tu ne tromperas pas</i> : la répression de l'adultère de l'Antiquité tardive à l'époque féodale.
Thèse de doctorat, Histoire du droit, Université de Bourgogne-Franche-Comté, 2019.
Résumé de la thèse :
L'adultère est un sujet complexe qui nécessite un gros travail de tri et d'analyse des sources antiques et aédiévales souvent difficiles d'accès. L'adultère est traité sous différents angles. En effet il ne faut pas se borner strictement à l'analyse juridique, mais aussi à une analyse anthropologique qui est nécessaire à l'aboutissement de cette recherche. Le but est de montrer l'évolution de la répression de l'adultère chez la femme. L'implantation du christianisme dans les mœurs de la société mais aussi de l'affirmation du pouvoir central séculier permettent de comprendre cette évolution. En effet le rôle de l'Église ne cesse de croître entre le Ve et le XIIe siècle. Ce thème, a priori ressassé, est en réalité souvent traité sous l'angle strictement juridique. Or, ici, il faut mêler l'approche juridique avec celle anthropologique qui ouvre, en suivant les traces de l'ouvrage novateur de Jean-Pierre Poly, <i>Le chemin des amours barbares</i> (Paris, 2003), une nouvelle manière d'appréhender cette question cruciale. À Rome, malgré les mesures prises sous la République, le nombre d'adultères allait en augmentant. Le fléau de l'adultère n'a épargné aucune catégorie de citoyens. Auguste crut qu'il fallait remédier à un tel état des choses et punir de façon rigoureuse ceux qui s'y donnaient. Il a pensé qu'une loi spéciale, édictant des peines dures, étaient nécessaires afin d'obliger les maris à avoir moins d'indulgence pour les désordres de leurs femmes et afin d'empêcher les adultères ou, du moins, de restreindre leur nombre. C'est dans ce but qu'il fit voter la loi « <i>Lex Julia de adulteriis</i> » que des textes appellent aussi « <i>Lex Julia de pudicitia</i> » ou encore « <i>Lex Julia de adulteriis coercendis</i> ». Le titre du Digeste qui lui est consacré est intitulé « <i>Ad legem Julium de adulteriis</i> ». Le but que se proposait Auguste n'a pas été atteint. La loi s'est inspirée de deux idées qui sont celle du délit contre la famille et celle du délit contre la société. La loi Julia établit contre les personnes reconnues coupables d'adultère un ensemble de peines principales et de pénalités complémentaires rigoureuses. Le christianisme aurait dû apporter des changements. Pour l'Église, par ordre décroissant, les trois plus grands maux sont l'inceste, l'homosexualité et l'adultère. La cellule familiale étant le noyau de la société, l'adultère, atteinte au sacrement du mariage, est ce qui menace le plus la « nef familiale ». Il appartient au secret des alcôves et des confessionnaux. Ce silence s'explique par la honte qu'il engendre. Les archives ne distinguent pas unions libres et illégitimes, mariages clandestins et liaisons. Les données varient d'une région à l'autre. Durant une longue période du Moyen Age, les tribunaux ecclésiastiques, les officiaux responsables des affaires de mariages, ont prétendu avoir seuls à connaître des accusations d'adultère. Ils se permettaient de convoquer des hommes sur de simples soupçons liés à la rumeur publique, les forçant à composer moyennant une somme d'argent. L'apparition du christianisme et la diffusion des valeurs morales attenantes, parmi lesquelles figurent la chasteté et la fidélité conjugale, va accroître la répression de l'adultère à l'époque médiévale. Le développement du christianisme va également avoir pour conséquence d'établir une dualité entre les juridictions. En effet, le droit canonique et le droit laïc ne vont pas proposer les mêmes solutions concernant ces affaires d'adultères. Ainsi, le droit canonique va condamner de la même manière l'adultère du mari et de la femme en vertu du principe fondateur « <i>una lex de mulieribus et viris</i> » alors que le droit laïc s'en tient à la seule pénalisation de l'adultère féminin, arguant que seul cet adultère risquait de léser les enfants légitimes du mari en introduisant dans la famille des bâtards clandestins, chose qui ne risquait pas d'arriver, par définition, en cas d'adultère masculin. Cette justification montre que l'adultère de la femme est à mi-chemin entre une injure privée au seul mari et une atteinte publique à l'ordre social. On semble le considérer comme une atteinte à l'ordre familial qui est une valeur importante dans la société. En réalité, l'Église, en dépit de ses efforts, ne va être en mesure que de réaliser un programme minimal. La dualité droit laïc et canon se retrouve dans la sanction applicable. Le droit germanique réprime durement l'adultère des femmes qui sont tondues, dépouillées et chassées de la maison. Le droit canon ne prévoit souvent que des peines religieuses puis, sous la pression du droit coutumier, la sanction s'aggrave avec l'apparition d'une véritable peine d'emprisonnement, très rare à l'époque médiévale. Il est intéressant de voir comment le droit mérovingien et carolingien va cohabiter avec le droit canonique. L'Église aura du mal à instaurer l'égalité homme-femme en matière d'adultère. Seul celui de la femme sera réprimé par des poursuites criminelles (on trouve encore cette inégalité dans le code de 1810, où le mari n'est puni que d'une simple amende). Durant le Moyen Âge, le problème de l'adultère de la femme se comprend à la lumière du principe d'indissolubilité (mis en place par l'Église à partir du XIIe siècle). Il faut voir l'évolution de la répression de l'adultère chez la femme entre la fin de l'Empire Romain et le principe d'indissolubilité. Plus qu'une évolution générale, il y a de grandes séquences qui se comprennent à la lumière de l'implantation du christianisme dans les mœurs de la société mais aussi de l'affirmation du pouvoir central séculier. C'est une histoire éminemment politique. Le rôle de l'Église ne cesse de croître entre le Ve et le XIIe siècle dans le royaume de France. Pouvons-nous aussi parler d'une évolution similaire s'agissant du domaine de l'adultère.
Thèse de doctorat, Histoire du droit, Université de Bourgogne-Franche-Comté, 2019.
Résumé de la thèse :
L'adultère est un sujet complexe qui nécessite un gros travail de tri et d'analyse des sources antiques et aédiévales souvent difficiles d'accès. L'adultère est traité sous différents angles. En effet il ne faut pas se borner strictement à l'analyse juridique, mais aussi à une analyse anthropologique qui est nécessaire à l'aboutissement de cette recherche. Le but est de montrer l'évolution de la répression de l'adultère chez la femme. L'implantation du christianisme dans les mœurs de la société mais aussi de l'affirmation du pouvoir central séculier permettent de comprendre cette évolution. En effet le rôle de l'Église ne cesse de croître entre le Ve et le XIIe siècle. Ce thème, a priori ressassé, est en réalité souvent traité sous l'angle strictement juridique. Or, ici, il faut mêler l'approche juridique avec celle anthropologique qui ouvre, en suivant les traces de l'ouvrage novateur de Jean-Pierre Poly, <i>Le chemin des amours barbares</i> (Paris, 2003), une nouvelle manière d'appréhender cette question cruciale. À Rome, malgré les mesures prises sous la République, le nombre d'adultères allait en augmentant. Le fléau de l'adultère n'a épargné aucune catégorie de citoyens. Auguste crut qu'il fallait remédier à un tel état des choses et punir de façon rigoureuse ceux qui s'y donnaient. Il a pensé qu'une loi spéciale, édictant des peines dures, étaient nécessaires afin d'obliger les maris à avoir moins d'indulgence pour les désordres de leurs femmes et afin d'empêcher les adultères ou, du moins, de restreindre leur nombre. C'est dans ce but qu'il fit voter la loi « <i>Lex Julia de adulteriis</i> » que des textes appellent aussi « <i>Lex Julia de pudicitia</i> » ou encore « <i>Lex Julia de adulteriis coercendis</i> ». Le titre du Digeste qui lui est consacré est intitulé « <i>Ad legem Julium de adulteriis</i> ». Le but que se proposait Auguste n'a pas été atteint. La loi s'est inspirée de deux idées qui sont celle du délit contre la famille et celle du délit contre la société. La loi Julia établit contre les personnes reconnues coupables d'adultère un ensemble de peines principales et de pénalités complémentaires rigoureuses. Le christianisme aurait dû apporter des changements. Pour l'Église, par ordre décroissant, les trois plus grands maux sont l'inceste, l'homosexualité et l'adultère. La cellule familiale étant le noyau de la société, l'adultère, atteinte au sacrement du mariage, est ce qui menace le plus la « nef familiale ». Il appartient au secret des alcôves et des confessionnaux. Ce silence s'explique par la honte qu'il engendre. Les archives ne distinguent pas unions libres et illégitimes, mariages clandestins et liaisons. Les données varient d'une région à l'autre. Durant une longue période du Moyen Age, les tribunaux ecclésiastiques, les officiaux responsables des affaires de mariages, ont prétendu avoir seuls à connaître des accusations d'adultère. Ils se permettaient de convoquer des hommes sur de simples soupçons liés à la rumeur publique, les forçant à composer moyennant une somme d'argent. L'apparition du christianisme et la diffusion des valeurs morales attenantes, parmi lesquelles figurent la chasteté et la fidélité conjugale, va accroître la répression de l'adultère à l'époque médiévale. Le développement du christianisme va également avoir pour conséquence d'établir une dualité entre les juridictions. En effet, le droit canonique et le droit laïc ne vont pas proposer les mêmes solutions concernant ces affaires d'adultères. Ainsi, le droit canonique va condamner de la même manière l'adultère du mari et de la femme en vertu du principe fondateur « <i>una lex de mulieribus et viris</i> » alors que le droit laïc s'en tient à la seule pénalisation de l'adultère féminin, arguant que seul cet adultère risquait de léser les enfants légitimes du mari en introduisant dans la famille des bâtards clandestins, chose qui ne risquait pas d'arriver, par définition, en cas d'adultère masculin. Cette justification montre que l'adultère de la femme est à mi-chemin entre une injure privée au seul mari et une atteinte publique à l'ordre social. On semble le considérer comme une atteinte à l'ordre familial qui est une valeur importante dans la société. En réalité, l'Église, en dépit de ses efforts, ne va être en mesure que de réaliser un programme minimal. La dualité droit laïc et canon se retrouve dans la sanction applicable. Le droit germanique réprime durement l'adultère des femmes qui sont tondues, dépouillées et chassées de la maison. Le droit canon ne prévoit souvent que des peines religieuses puis, sous la pression du droit coutumier, la sanction s'aggrave avec l'apparition d'une véritable peine d'emprisonnement, très rare à l'époque médiévale. Il est intéressant de voir comment le droit mérovingien et carolingien va cohabiter avec le droit canonique. L'Église aura du mal à instaurer l'égalité homme-femme en matière d'adultère. Seul celui de la femme sera réprimé par des poursuites criminelles (on trouve encore cette inégalité dans le code de 1810, où le mari n'est puni que d'une simple amende). Durant le Moyen Âge, le problème de l'adultère de la femme se comprend à la lumière du principe d'indissolubilité (mis en place par l'Église à partir du XIIe siècle). Il faut voir l'évolution de la répression de l'adultère chez la femme entre la fin de l'Empire Romain et le principe d'indissolubilité. Plus qu'une évolution générale, il y a de grandes séquences qui se comprennent à la lumière de l'implantation du christianisme dans les mœurs de la société mais aussi de l'affirmation du pouvoir central séculier. C'est une histoire éminemment politique. Le rôle de l'Église ne cesse de croître entre le Ve et le XIIe siècle dans le royaume de France. Pouvons-nous aussi parler d'une évolution similaire s'agissant du domaine de l'adultère.
Auteur
GIROUX (SABBAH), Laure-Audrey
Année
2019
Type
Thèse
Mot-clé
Histoire de la famille
Droit romain
Droit canonique
Coutumes - Coutumiers
Adultère
Anthropologie juridique
Bas-Empire romain
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