Avant Beccaria. Utopie et peine de mort au XVIIIe siècle
Contenu
Titre
Avant Beccaria. Utopie et peine de mort au XVIIIe siècle
Auteur
AUDEGEAN, Philippe
Résumé
Les utopies reprochent souvent aux sociétés réelles de châtier les vices au lieu de les rendre impossibles. Si on ne punit pas beaucoup en Utopie, c’est donc parce qu’on prévient les infractions au lieu d’avoir à les réprimer. Et si, lorsqu’on les punit, on le fait avec plus de douceur et plus d’humanité, c’est d’abord pour la raison que les crimes y sont moins fréquents et moins graves.
La peine capitale reste pourtant souvent présente dans l’arsenal punitif des Utopiens. Sous le soleil égalitaire de la cité idéale plane encore l’ombre sinistre des appareils de mort. Cette persistance s’explique sans doute et paradoxalement par la perfection même des lois utopiennes, dont la moindre transgression apparaît aussitôt et à plus forte raison comme irrationnelle et contre nature. Ainsi, dans l’Utopie de Thomas More, les Utopiens insoumis sont tués comme des « bêtes sauvages et indomptées ». Quand, comme dans le monde réel, les biens sont inégalement répartis, quand une éducation inadaptée favorise les vices au lieu de les empêcher, la déviance individuelle peut, au moins en partie, être expliquée par des causes sociales ; mais en Utopie, elle plonge forcément ses racines dans la perversité singulière d’une âme rebelle.
À l’évidence, pourtant, on ne saurait s’en tenir à ce constat. Si les peines sont plus douces en utopie, ce n’est pas seulement parce qu’elles peuvent se permettre de l’être dans le monde idéal, mais c’est aussi parce qu’elles devraient l’être dans le monde réel…
La peine capitale reste pourtant souvent présente dans l’arsenal punitif des Utopiens. Sous le soleil égalitaire de la cité idéale plane encore l’ombre sinistre des appareils de mort. Cette persistance s’explique sans doute et paradoxalement par la perfection même des lois utopiennes, dont la moindre transgression apparaît aussitôt et à plus forte raison comme irrationnelle et contre nature. Ainsi, dans l’Utopie de Thomas More, les Utopiens insoumis sont tués comme des « bêtes sauvages et indomptées ». Quand, comme dans le monde réel, les biens sont inégalement répartis, quand une éducation inadaptée favorise les vices au lieu de les empêcher, la déviance individuelle peut, au moins en partie, être expliquée par des causes sociales ; mais en Utopie, elle plonge forcément ses racines dans la perversité singulière d’une âme rebelle.
À l’évidence, pourtant, on ne saurait s’en tenir à ce constat. Si les peines sont plus douces en utopie, ce n’est pas seulement parce qu’elles peuvent se permettre de l’être dans le monde idéal, mais c’est aussi parce qu’elles devraient l’être dans le monde réel…
Année
2020
Type
Article
Lieu
Paris
Titre du périodique
Numéro
n°4
Pages
pp. 363-370
ISBN
978 2 275 07471 9
Mot-clé
URL
https://www.cairn.info/revue-droit-et-litterature-2020-1.htm