Le renseignement français auprès du Roi Catholique (1630-1635). [Thèse].
Item
Titre
Le renseignement français auprès du Roi Catholique (1630-1635). [Thèse].
[Thèse de l'École des chartes, 2006].
Introduction de la thèse :
En janvier 1629, le cardinal de Richelieu, du Conseil d’En haut depuis mai 1624, formulait dans un avis fameux au roi Louis XIII son dessein en politique européenne : « il faut avoir en dessein perpétuel d’arrêter le cours des progrès de l’Espagne ». Pour réussir semblable objectif encore fallait-il connaître son adversaire, en estimer justement la puissance, les potentiels militaires, pénétrer les intentions de ses ministres, en un mot s’informer. C’était faire de la prudence un principe gouvernemental, un principe qui s’accordait avec l’héritage géopolitique du XVIe siècle. Encerclant une France bi-confessionnelle, fragilisée par les terribles expériences des guerres de religion et de la Ligue, l’empire espagnol, gouverné depuis Madrid, alimenté par les immenses ressources de son empire, fort de l’alliance impériale et de sa vocation de défenseur de la catholicité, semblait gouverner l’échiquier diplomatique.
Quels furent donc les avis qui présidèrent à la prise de décision de mai 1635 ? Quels arguments justifièrent la lourde responsabilité d’une rupture avec l’Espagne, tournant capital au regard des années de paix procurées par le traité de Vervins du 13 mai 1598 ? Quels discours légitimaient de renouer avec une politique étrangère comparable à celle de François Ier ou d’Henri IV qui s’était abîmée dans les traités du Cateau-Cambrésis et de Vervins ? Qui mieux que les ambassadeurs, « ceux qui de près voient bien mieux les choses que les plus éloignés », envoyés auprès du Roi Catholique, Philippe IV à Madrid, « cœur décisionnel de cette monarchie agrégative hispanique », pouvait être apte à informer le gouvernement français de l’état des rapports de force bilatéraux ? Or sur Antoine de Jaubert, comte de Barrault, ambassadeur ordinaire de Louis XIII auprès de Philippe IV à Madrid, nommé en 1629 et rappelé dès décembre 1634, nulle étude historiographique, des archives très rares au ministère des Affaires étrangères, pour un personnage que Tallemant lui-même ignore dans ses Historiettes.
Un silence étonnant pour une nomination dont Richelieu n’ignorait pas l’enjeu. N’affirmait-il pas qu’« un ambassadeur mal choisy pour faire un traité peut, par son ignorance, porter un notable préjudice » ? Et attribuer cette charge d’ambassadeur ordinaire, résident permanent auprès du Roi Catholique, était d’autant plus stratégique en cette année 1629 que la France avait entrepris par les affaires valtelinaise de 1625 et mantouane de 1628 un retour manifeste sur la scène diplomatique européenne, un retour peu apprécié d’une monarchie espagnole dont l’empire montrait des faiblesses : fragilité stratégique du <i>camino</i> espagnol via les axes Milan-Graz et Milan-Suisse-Alsace, fragilité stratégique de la <i>carrea</i> atlantique victime d’une efficace politique de course hollandaise, fragilité économique avec une chute de la valeur des flottes du Trésor et une déflation du <i>véllon</i>, enfin fragilité militaire et confessionnelle avec la reprise de la guerre contre les Provinces-Unies en 1621. La crispation des relations franco-espagnoles se greffa sur le terrible conflit de la guerre de Trente Ans et les puissances européennes eurent à tenir compte de ces deux foyers de tensions pour se positionner si bien que le jeu des alliances se redistribua à partir de 1628-1629, faisant de la période 1630-1635 une période charnière dans la recomposition d’un équilibre diplomatique européen.
Les correspondances du comte de Barrault, ambassadeur ordinaire de 1630 à 1634, et de son secrétaire Pény, augmentées de celles des envoyés extraordinaires tels le comte d’Orval et de M. de Bautru, constituèrent pour le gouvernement français une source d’informations capitale pour estimer l’évolution des intérêts et des intentions espagnoles et définir en regard une stratégie diplomatique. Dans quelle mesure leurs avis et correspondances ont-ils influencé les prises de décisions du Conseil d’En haut durant ces cinq années ? Quels renseignements transmettaient-ils ? À qui ? Sous quelle forme ? Se firent-ils seulement le relais du discours officiel espagnol ou parvinrent-ils à percer le secret des entreprises espagnoles ? De quels réseaux et filières ont-ils bénéficié ? Quelle vision de l’Espagne ont-ils brossée ? Fut-elle partiale ? Confirme-t-elle le discours historiographique d’un déclin de l’empire espagnol ? Relaya-t-elle « l’antipathie franco-espagnole », croissante depuis les années 1620 ?
[Thèse de l'École des chartes, 2006].
Introduction de la thèse :
En janvier 1629, le cardinal de Richelieu, du Conseil d’En haut depuis mai 1624, formulait dans un avis fameux au roi Louis XIII son dessein en politique européenne : « il faut avoir en dessein perpétuel d’arrêter le cours des progrès de l’Espagne ». Pour réussir semblable objectif encore fallait-il connaître son adversaire, en estimer justement la puissance, les potentiels militaires, pénétrer les intentions de ses ministres, en un mot s’informer. C’était faire de la prudence un principe gouvernemental, un principe qui s’accordait avec l’héritage géopolitique du XVIe siècle. Encerclant une France bi-confessionnelle, fragilisée par les terribles expériences des guerres de religion et de la Ligue, l’empire espagnol, gouverné depuis Madrid, alimenté par les immenses ressources de son empire, fort de l’alliance impériale et de sa vocation de défenseur de la catholicité, semblait gouverner l’échiquier diplomatique.
Quels furent donc les avis qui présidèrent à la prise de décision de mai 1635 ? Quels arguments justifièrent la lourde responsabilité d’une rupture avec l’Espagne, tournant capital au regard des années de paix procurées par le traité de Vervins du 13 mai 1598 ? Quels discours légitimaient de renouer avec une politique étrangère comparable à celle de François Ier ou d’Henri IV qui s’était abîmée dans les traités du Cateau-Cambrésis et de Vervins ? Qui mieux que les ambassadeurs, « ceux qui de près voient bien mieux les choses que les plus éloignés », envoyés auprès du Roi Catholique, Philippe IV à Madrid, « cœur décisionnel de cette monarchie agrégative hispanique », pouvait être apte à informer le gouvernement français de l’état des rapports de force bilatéraux ? Or sur Antoine de Jaubert, comte de Barrault, ambassadeur ordinaire de Louis XIII auprès de Philippe IV à Madrid, nommé en 1629 et rappelé dès décembre 1634, nulle étude historiographique, des archives très rares au ministère des Affaires étrangères, pour un personnage que Tallemant lui-même ignore dans ses Historiettes.
Un silence étonnant pour une nomination dont Richelieu n’ignorait pas l’enjeu. N’affirmait-il pas qu’« un ambassadeur mal choisy pour faire un traité peut, par son ignorance, porter un notable préjudice » ? Et attribuer cette charge d’ambassadeur ordinaire, résident permanent auprès du Roi Catholique, était d’autant plus stratégique en cette année 1629 que la France avait entrepris par les affaires valtelinaise de 1625 et mantouane de 1628 un retour manifeste sur la scène diplomatique européenne, un retour peu apprécié d’une monarchie espagnole dont l’empire montrait des faiblesses : fragilité stratégique du <i>camino</i> espagnol via les axes Milan-Graz et Milan-Suisse-Alsace, fragilité stratégique de la <i>carrea</i> atlantique victime d’une efficace politique de course hollandaise, fragilité économique avec une chute de la valeur des flottes du Trésor et une déflation du <i>véllon</i>, enfin fragilité militaire et confessionnelle avec la reprise de la guerre contre les Provinces-Unies en 1621. La crispation des relations franco-espagnoles se greffa sur le terrible conflit de la guerre de Trente Ans et les puissances européennes eurent à tenir compte de ces deux foyers de tensions pour se positionner si bien que le jeu des alliances se redistribua à partir de 1628-1629, faisant de la période 1630-1635 une période charnière dans la recomposition d’un équilibre diplomatique européen.
Les correspondances du comte de Barrault, ambassadeur ordinaire de 1630 à 1634, et de son secrétaire Pény, augmentées de celles des envoyés extraordinaires tels le comte d’Orval et de M. de Bautru, constituèrent pour le gouvernement français une source d’informations capitale pour estimer l’évolution des intérêts et des intentions espagnoles et définir en regard une stratégie diplomatique. Dans quelle mesure leurs avis et correspondances ont-ils influencé les prises de décisions du Conseil d’En haut durant ces cinq années ? Quels renseignements transmettaient-ils ? À qui ? Sous quelle forme ? Se firent-ils seulement le relais du discours officiel espagnol ou parvinrent-ils à percer le secret des entreprises espagnoles ? De quels réseaux et filières ont-ils bénéficié ? Quelle vision de l’Espagne ont-ils brossée ? Fut-elle partiale ? Confirme-t-elle le discours historiographique d’un déclin de l’empire espagnol ? Relaya-t-elle « l’antipathie franco-espagnole », croissante depuis les années 1620 ?
Auteur
BECDELIÈVRE, Cécile de
Année
2006
Type
Thèse
Pages
Espagne
Diplomatie - Diplomates
Ambassadeurs - Ambassades
Correspondance diplomatique
Renseignements diplomatiques
Guerre de Trente ans
Histoire politique
Histoire des relations internationales
Antoine de Jaubert, comte de Barrault (1577-1655), ambassadeur
XVIIe
Diplomatie - Diplomates
Ambassadeurs - Ambassades
Correspondance diplomatique
Renseignements diplomatiques
Guerre de Trente ans
Histoire politique
Histoire des relations internationales
Antoine de Jaubert, comte de Barrault (1577-1655), ambassadeur
XVIIe